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Mais au fond, la piquette, c’est quoi?

CHRONIQUE. Le mot est couramment utilisé pour évoquer un mauvais vin. Pourtant, la piquette, ce n’est pas cela. Bien au contraire même. On vous explique tout

 © Illustration: Hector de La Vallée pour Le Temps
 © Illustration: Hector de La Vallée pour Le Temps

C’est entré dans les mœurs et on ne le changera plus. Le terme «piquette» est couramment utilisé pour parler d’un mauvais vin. Bel abus de langage! Car non, historiquement, la piquette n’est pas un mauvais vin. Ce n’est même pas un vin, puisque ce dernier est, selon sa définition, une boisson fermentée préparée à partir de jus de raisin. Et rien de tout cela pour la piquette. Mais alors, c’est quoi?

«On pourrait la définir comme de l’eau aromatisée, grâce à la macération de marc de raisin», indique Johanna Dayer. Candidate au Master of Wine, l’examen théorique et pratique le plus complexe de l’univers du vin, la vigneronne valaisanne détaille: «Une fois la macération des peaux terminée pour donner leur couleur aux vins rouges, on récupérait le marc (composé des peaux, des pépins et des rafles), on y ajoutait de l’eau et un peu de sucre au besoin et on laissait le tout fermenter ou non.» Résultat: une boisson rosée, légèrement sucrée, avec très peu d’alcool (même sans fermentation, le contact de l’eau avec le marc de raisin, qui contient un peu d’alcool, engendre forcément de la piquette légèrement alcoolisée) et facile à boire. Elle était particulièrement appréciée des ouvriers viticoles, car très peu chère à élaborer.

De par son procédé de fabrication, la piquette a un vague goût de vin léger. En cela, elle se rapprochait de certains vins de l’époque, à la qualité moindre. Fabriqués à partir de raisins produits en gros volumes, ils étaient très dilués et sans goût. «Il semblerait qu’ils ressemblaient à la piquette et c’est pour cette raison que les mauvais vins ont pris ce nom», souligne Johanna Dayer.

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La renaissance de la piquette

Démocratisée au XIXe siècle, la piquette a gentiment disparu au fil des décennies. Jusqu’à ces dernières années. «Il y a une renaissance de la piquette, notamment aux Etats-Unis et au Canada. Et cette tendance se développe aussi quelque peu en Europe», assure la vigneronne valaisanne. Et pour cause: «Avec la tendance du zéro déchet, nombreux sont les vignerons à chercher une solution pour valoriser le marc.» Et quoi de mieux que la piquette, facile et pas chère à produire?

Mais est-ce que, contrairement à ce que son nom laisse penser, la piquette peut être bonne? «Evidemment, répond Johanna Dayer. Mais il ne faut pas voir cela comme un vin, plutôt comme un soft drink sympa et idéal pour l’apéro, bien frais, en été.» La vigneronne valaisanne est d’ailleurs intriguée par cette boisson et aimerait trouver un moyen d’en fabriquer sans alcool. «Ce serait idéal pour les accords mets/boissons non alcoolisées dans les restaurants gastronomiques.» Alors, on se boit une bonne piquette?


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